Anvers
Le 12 juin 2023, le Palais de Justice sis Britselei 55 à Anvers a officiellement rouvert en présence du ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, du secrétaire d’État chargé de la Régie des Bâtiments, Mathieu Michel, et du bourgmestre d’Anvers, Bart De Wever.

Au cours des trois dernières années, ce bâtiment monumental a été restauré et rénové en profondeur, sur ordre de la Régie des Bâtiments. Non seulement le bâtiment répond désormais à toutes les exigences actuelles d’un palais de justice (sécurité, confort, efficacité énergétique, etc.), mais le concept original de l’architecte Lode Baeckelmans a également été remis à l’honneur.

Vincent Van Quickenborne, ministre de la Justice : « Le Britselei prouve qu’un cadre historique et une Justice moderne peuvent aller de pair. Plus encore, ce projet est un modèle de la façon dont la Justice devient plus rapide, plus humaine et plus rigoureuse. Plus rapide grâce aux applications numériques pour la tenue d’audiences vidéo, la toute nouvelle installation informatique et un espace d’archives central, de sorte que les dossiers ne soient plus dispersés à plusieurs endroits dans la ville. Plus humaine via un accueil unifié, des salles d’attente séparées pour les victimes et les prévenus, un local fixe pour l’aide aux victimes, un service de guide pour les plaignants, des kiosques PC pour consulter les dossiers sous forme numérique et une bonne accessibilité pour les personnes à mobilité réduite. Plus rigoureuse, notamment par des techniques de sécurité de pointe et la division en clusters pour une collaboration optimale entre les différents services. La cour d’appel d’Anvers, le parquet général, la cour du travail, l’auditorat général et la cour d’assises réintégreront ce bâtiment monumental. Le Britselei se positionne en outre sur le marché de la Justice comme un employeur attrayant via le recrutement de nombreux collègues supplémentaires. »

Mathieu Michel, secrétaire d’État chargé de la Régie des Bâtiments : « Aujourd’hui, nous réouvrons le Palais de Justice Britselei à Anvers. Nous améliorons le confort des utilisateurs et la durabilité du bâtiment tout en préservant notre patrimoine historique. A l’instar du Palais de Justice de Bruxelles, ce lieu est un symbole important de notre histoire. Il est également un symbole de notre démocratie. »

Bart De Wever, bourgmestre d’Anvers : « Dame Justice porte un bandeau sur les yeux, mais Anvers ne pouvait plus ignorer les conditions désastreuses dans lesquelles les services judiciaires du Walsekaai devaient travailler. Un palais de justice sécurisé et durable, disposant de tous les équipements modernes, est essentiel à notre État de droit. C’est donc un triomphe que le magnifique patrimoine de l’ancien palais de justice ait non seulement été restauré avec soin, mais qu’il ait également retrouvé son noble rôle qu’est le sien. Au nom de tous les Anversois, je tiens à remercier tous ceux qui y ont travaillé dur. »

Historique du bâtiment

Le Palais de Justice Britselei a été construit entre 1871 et 1879, selon les plans de Lode Baeckelmans, et a été inauguré officiellement en 1877. L’immeuble de style éclectique, agrémenté d’une touche de néo-Renaissance, fait partie de la série de monuments imposants érigés le long des grands boulevards anversois (appelés « Leien ») et incarne le caractère prestigieux du pouvoir judiciaire du 19e siècle. Les intérieurs et les salles d’audience richement décorés, dont la fameuse cour d’assises, en témoignent. Le 19 juin 1997, le bâtiment a été protégé en tant que monument classé en raison de sa valeur artistique et historique.

Le bâtiment a toutefois connu de nombreuses phases de construction et de transformation depuis son édification. Du côté extérieur, une attention particulière a été portée, à chaque reprise, à l’uniformité de l’ensemble. Il est donc difficile d’y distinguer les différentes phases. À l’intérieur en revanche, cette uniformité a été ternie par les nombreux « agrandissements ». Malgré le grand nombre d’adaptations, le bâtiment s’est en outre avéré trop petit pour les services judiciaires d’Anvers, qui ont par conséquent dû déménager vers le nouveau palais de justice sis place Bolivar en 2006. L’avenir de cet ancien palais de justice monumental, où il ne restait principalement que des cours d’assises, était incertain. Le dernier procès s’y est tenu en octobre 2016.

Études préalables

L’équipe de projet TV OGA — une association temporaire composée des bureaux d’études et de projet HUB, Origin, Bureau Bouwtechniek et RCR — a été désignée pour l’établissement d’un masterplan pour le palais de justice. À l’issue d’une longue recherche, la Régie des Bâtiments a décidé, en concertation avec le SPF Justice, de réaffecter l’ancien palais de justice en tant que nouveau port d’attache pour la cour d’appel, le parquet général, la cour du travail, l’auditorat général et la cour d’assises d’Anvers.

Ce masterplan a résulté en une étude et un projet intégrés en vue, d’une part, de restaurer le bâtiment en respectant sa valeur patrimoniale et, d’autre part, de répondre aux besoins du SPF Justice. À cet égard, une recherche sur l’historique de la construction et la technique des matériaux était indispensable. Le dossier de projet a été établi en concertation avec l’agence Onroerend Erfgoed.

Bien que le bâtiment ait été initialement conçu pour répondre aux besoins de notre système judiciaire, le maintien de cette fonction signifie que le bâtiment est aujourd’hui confronté à un programme d’exigences plus strict que lors de sa première mise en service. Les travaux de restauration devaient donc préparer le bâtiment à une nouvelle ère, avec un confort d’utilisation amélioré, une consommation d’énergie réduite et sur mesure pour la cour d’appel, sans toutefois porter atteinte à la dignité et à la monumentalité du bâtiment.

Restauration et rénovation en profondeur

Les travaux ont débuté en novembre 2019 et ont été exécutés par l’entreprise Artes Group. Les travaux de démolition et de gros œuvre ont été réalisés dans une première phase, ce qui a représenté un véritable défi logistique. En effet, le palais de justice se situe dans la ville, avec peu d’espace autour de lui. La première année des travaux, les débris ont souvent dû être évacués avec des brouettes, et les matériaux ont dû être amenés de la même manière sur le chantier.

Ces travaux comprenaient la toiture et la menuiserie extérieure, l’intégration des techniques, la restauration des précieux intérieurs, la rénovation des espaces de bureau et l’aménagement de l’environnement extérieur.

Symbiose entre l’ancien et le nouveau

Le concept initial de l’architecte Baeckelmans était très clairement structuré. Les nombreux ajouts et adaptations effectués au cours du siècle dernier avaient altéré la logique spatiale et fonctionnelle à l’intérieur du bâtiment. En outre, ces ajouts bloquaient l’entrée de la lumière naturelle à plusieurs endroits. La remise à l’honneur de la structure initiale constituait la base de la philosophie d’intervention et du concept final. Le confort d’utilisation, le rétablissement de la lumière du jour, la durabilité et la sécurité étaient, en parallèle, à l’avant-plan.

Une intervention importante a été l’enlèvement de la coupole ajoutée au-dessus du greffe dans les années 1930. La cour intérieure historique a ainsi été remise à l’honneur et la lumière naturelle peut de nouveau atteindre les étages inférieurs. La cour intérieure est un espace extérieur de qualité entre la Salle des Pas perdus et la cage d’escalier monumentale le long de la Stockmansstraat. Les façades extérieures historiques ont été restaurées. Une élégante colonnade en acier permet d’utiliser la cour intérieure ouverte par tout temps. Grâce à cette intervention et à l’intégration de trois grandes coupoles, la lumière du jour pénètre de nouveau dans l’impressionnante Salle des Pas perdus.

Une autre intervention est le démantèlement des cours historiques des deux côtés de la cour d’assises. Cela améliore l’éclairage et la vue dans les espaces adjacents, et rétablit aussi la morphologie d’origine. L’ajout d’une cour d’assises supplémentaire pour la chambre des mises en accusation s’est fait ici de telle manière que la cour initiale reste visible.

L’impressionnante ancienne cour d’assises a reçu une deuxième affectation, en tant que salle d’audience polyvalente et solennelle. Afin de permettre cette transformation, du mobilier contemporain renforçant et enrichissant l’ambiance authentique de l’espace a été conçu. Le bâtiment est ainsi adapté aux besoins en évolution de notre système judiciaire. Les toiles marouflées (peintures sur toile sur les murs) ont été soigneusement nettoyées et retouchées.

La combinaison d’un plafonnier supplémentaire et d’une toute nouvelle installation d’éclairage éclaire la salle d’un jour nouveau.

L’acoustique des espaces était mauvaise en raison des nombreuses surfaces rigides. L’utilisation de tapis acoustiques et de plafonds de plâtre absorbants a considérablement amélioré l’intelligibilité dans toutes les salles d’audience. Ces interventions permettent de les utiliser de manières aussi diverses que possible, pour de petites audiences avec un public limité, de plus grands procès, mais aussi des audiences à huit clos.

Avant les travaux de restauration, le dernier étage (niveau +4) ressemblait à un grenier. De petites fenêtres, une hauteur limitée et un dédale de couloirs et de locaux y rendaient le séjour désagréable et chaotique. Cet étage a été mis à nu jusqu’à la structure portante en béton afin de faire place à des espaces de bureau qualitatifs avec une nouvelle toiture isolée et une nouvelle façade performante dans la zone intérieure.

Sur les façades extérieures, des lucarnes ont été ajoutées en respectant la structure et les articulations existantes. La nouvelle façade intérieure de cet étage s’articule autour de l’architecture en briques des niveaux sous-jacents et a été modernisée de façon subtile par les linteaux et seuils en béton.

Au centre, au-dessus de la Salle des Pas perdus, les espaces historiques ont été réaménagés en des espaces communs. Nous y trouvons successivement le réfectoire du personnel, une bibliothèque et une salle de réunion spacieuse qui peut également être utilisée comme centre de crise

La sécurité avant tout

Les voies de circulation pour le public, la police, les magistrats et le personnel sont désormais séparées dans le palais de justice, ce qui influence de manière positive la sécurité.

Un pavillon a été édifié dans le jardin avant du côté de l’Anselmostraat, pour permettre de faire entrer et sortir les détenus en toute discrétion et sécurité à l’aide de fourgons. Le pavillon est composé d’une structure en acier convertible indépendante du bâtiment historique.

Efficacité énergétique et récupération des matériaux

Le projet de restauration a été l’occasion de moderniser autant que possible le palais de justice sur les plans énergétique et ergonomique, afin de le préparer à une nouvelle ère. Vu le caractère monumental du bâtiment, une approche spécifique sur mesure était nécessaire.

Les toitures ont été isolées et la menuiserie extérieure a été remplacée par de la menuiserie performante, dans le respect de l’aspect historique. En outre, des techniques durables ont été intégrées dans le bâtiment, ce qui a amélioré son efficacité énergétique. Plusieurs toits plats ont aussi été recouverts de végétation (plus de 2 000 m²).

De plus, les matériaux et le mobilier ont été récupérés dans la mesure du possible et réutilisés à un autre endroit dans le bâtiment.

Déménagement des services judiciaires

À partir de septembre 2023, les procès d’assises seront de nouveau tenus au Britselei. Les services de la cour d’appel, de la cour du travail et du parquet général s’installeront ensuite progressivement dans le bâtiment.

Ces cours et tribunaux sont établis aujourd’hui à WaalseKaai à Anvers, à l’exception de la cour d’assises qui se trouve actuellement dans le palais de justice sis place Bolivar.

Fiche technique

Propriétaire : État belge
Maître de l’ouvrage : Régie des Bâtiments
Occupant : Service public fédéral Justice
Marché de conception et d’études : équipe de projet TvOGA (HUB — Origin — Bureau Bouwtechniek i.s.m. RCR, Ney & Partners et Daidalos Peutz)
Entrepreneur : Artes Group
Durée des travaux : 2019-2023
Superficie au sol : environ 23 000 m²
Coûts d’études et travaux de restauration/rénovation : environ 56,5 millions d'euros (TVA et révisions des prix incluses)